Cette semaine, France musique met en lumière « Un amour de Swann » de Marcel Proust. Fasciné par la beauté de la langue française et par la musique, l’auteur nous fait part d’un voyage littéraire et musical hors du temps, notamment au travers de la « Sonate de Vinteuil ».

Amant puis ami du chef d’orchestre et compositeur français Reynaldo Hahn, Marcel Proust a toujours éprouvé une fascination pour la musique, sujet d’admiration mais aussi modèle dans la conception de sa propre écriture, qu’il transpose dans nombre de ses ouvrages.

Selon l’auteur et biographe André Durand, pour Marcel Proust, « la musique est l’art le plus subtil, le plus universel ». Evoquée à plusieurs reprises dans La recherche du temps perdu, la Sonate de Vinteuil – œuvre fictive pour violon et piano – exerce un rôle majeur sur la psychologie des personnages. Mais, c’est dans Un amour de Swann  – deuxième partie Du côté de chez Swann – qu’elle emprunte ce caractère si singulier, sorte d’idéal esthétique qui active et bouscule l’imaginaire.

C’est notamment lors de la rencontre entre Charles Swann et Odette de Crécy, durant laquelle la sonate de Vinteuil est jouée, qu’elle provoque chez Swann un amour inconditionnel pour Odette. « Une petite phrase » répétitive, seulement 5 notes, qui vient transcender la relation de ces deux personnages jusqu’à en devenir « l’air national de leur amour » écrit l’auteur.

La « petite phrase » deviendra indispensable pour Swann et lui servira d’objet pour idéaliser l’être aimé. Elle symbolise une continuité, une stabilité que Swann ne connaît pas dans son amour avec Odette. « La petite phrase continuait de s’associer pour Swann à l’amour qu’il avait pour Odette » écrit Proust.

A l’intérieur de cette « petite phrase » musicale, Proust introduit en réalité sa vision intime de la musique. La musique prend pour lui une signification supérieure, qui parvient mieux que le langage lui-même à incarner l’éternité des sensations : la musique dure, contrairement à l’amour. Pour Proust, contrairement à Swann, la musique est davantage un sujet de contemplation que de plaisir.
Chacun est libre d’entendre ce qu’il souhaite au travers de cette sonate inaboutie et fictive. Et c’est précisément parce que cette pièce musicale, imaginée par Proust ne désigne aucune œuvre du répertoire qu’elle parvient si bien à caractériser l’atmosphère du roman.

Cependant, Proust, dans une dédicace Du côté de chez Swann à l’écrivain Jacques de Lacretelle, confie que plusieurs morceaux ont, selon lui, inspiré cette sonate. Il mentionne notamment la première sonate pour violon et piano de Saint-Saëns,l’Enchantement du Vendredi-Saint ( Parsifal de Wagner), mais aussi à la Ballade Op 19 de Fauré et la Sonate pour piano et violon de César Franck.

En bonus, réécoutez sur France Inter l’émission « Un été avec Proust » sur le thème de : Vinteuil et la musique.

Madeleine Saliceti

France Musique